Le rapport Pisa 2012, édité en 2014, vient de pointer le bout de son nez. Une fois de plus, Shanghai est le grand gagnant des tests en mathématique, compréhension de l’écrit et sciences. La constance dans le classement, bien qu’il soit la conséquence de l’inertie qu’il y a à monter en qualité d’apprentissage mais aussi à décroître, interpelle.
Résultats performants signifie-il épanouissement ?
La principale contradiction vient de ce que les bons écoliers chinois ne sont pas obligatoirement heureux à l’école. Ils sont formatés aux besoins économiques du pays, au détriment de leur épanouissement personnel. On peut d’ailleurs remarquer que le dynamisme économique ou la croissance sont des facteurs de pression sur les futurs salariés alliant les perspectives nationales à la notion d’ascenseur social. Réussir devient le tuteur majeur du bonheur.
Les parents, facteur de réussite
La constatation flagrante est que, globalement de par le monde, la détermination des parents et leur implication dans le parcours de leurs enfants, impacte fortement la réussite des jeunes. On peut raisonnablement se demander en quoi l’accompagnement des enfants ne rime-t-il pas avec l’assouvissement des espoirs parentaux et le soin névrotique des angoisses. Des parents qui se trouvent pris dans une spirale de consommation sans retour n’imaginent pas un instant que leurs enfants ne connaissent pas le même confort.
Une école vivier
L’aptitude à l’autonomie semble aller de pair avec l’excellence des apprenants. Et il faut probablement s’arrêter un moment pour se dire que cette autonomie est incluse dans un schéma de comportements dicté par la loi des marchés. Que Shanghai, devenue la plaque financière tournante de la planète, fabrique des robots humains adaptés à l’analyse, le marketing, le commerce en général ne surprend pas. La quantité de réussite devient alors l’atout majeur de l’expansion : le nombre évitera la pénurie de matière grise, de qualification de haut niveau, peut importe les burn-out à venir tant le vivier est riche.
Favoriser la qualification à l’épanouissement
L’école qui devrait être un lieu ou l’on grandit n’est plus qu’un régime concentrationnaire où l’on grossit. Le sort réservé à nos poulets en batterie est celui choisi pour élever, dans le moule de la productivité, les élites de demain. De moins en moins de diversification, de métiers de l’esprit. De plus en plus de carrières collant au plus près avec les impératifs des politiques économiques. En cela il apparaît normal que l’homme s’adapte à ce que son environnement lui dicte mais l’absence cruelle de réflexion sur l’équilibre nécessaire , ne serait-ce qu’à la seule survie d’un patrimoine humain, le mènera à sa perte, avec l’école comme principal complice !
Nous parlions de pression, à l’instant. Il suffit de lire les conseils donnés aux étudiants dans certains domaines pour se rendre compte que, même si peu ont le cumul des qualités requises, tous doivent artificiellement l’atteindre en étant : curieux, passionné, ouvert d’esprit, bosseur, prêt à se remettre en question, à l’écoute, autonome, rigoureux, ambitieux, organisé. Afin de pouvoir prendre une place dans une société dans laquelle la tendance est à la surconsommation et à l’engraissement des actionnaires.
Une vue à court terme, une collusion économique
C’est toujours avec une certaine résistance que je découvre les conclusions de l’OCDE en terme de niveau des élèves. Le constat récurent souligne que le cadre familial est prépondérant et que les moyens d’éducation sont en adéquation avec l’économie du pays concerné. Les objectifs sont à courts et moyens termes, avoir une main d’œuvre efficace et dévouée, voués à une catastrophe sociétale. Le long terme est de moins en moins envisagé, le regard tourné juste au-delà de la première porte à ouvrir pour produire.
PISA n’est qu’un encouragement à ce que les pays membres se mettent au pas de la mondialisation des critères d’évaluation de l’être humain. Quelle philanthropie pourrait pousser l’OCDE à vouloir autre chose que ce pourquoi elle est programmée : botter les fesses des états mauvais élèves pour qu’ils alimentent le formidable marché de l’éducation.
Que chaque pays fasse selon ses spécificités, avec une philosophie ancrée dans ses racines. Les nations heureuses vivront, les autres ?…