Trop orgueilleux pour la planète, les humains ?

L’homme a développé au cours des dernières décennies une suffisance et un orgueil dont rirait probablement Molière dans une farce enlevée. Il pourrait y ajouter la vanité de croire que l’humanité est maître d’elle-même, qu’elle donne à son destin toute assurance de pérennité.

Incendie (RICHARD BOUHET / AFP)

Malheureusement, peut-être à cause du dérèglement climatique, sûrement au fait que les mécanismes de fonctionnement de la terre sont imprévisibles, et surtout inexorables, il n’est pas une semaine sans qu’une catastrophe épouvantable nous parvienne. L’eau, le feu, la terre et l’air. Les quatre éléments se déchaînent et font plier la nature pour la mettre au pas, sinon la détruire.

L’être humain, tel un fétu de paille, est régulièrement emporté dans la tourmente, y laissant ses illusions de puissance ou de sécurité.

Éléments furieux

Des airs de fin du monde à Bangkok, à la Réunion, à Fukushima, en Turquie. Et puis n’oublions pas Phuket et le tsunami, les ouragans et tornades des États-Unis. Nul nation n’est épargnée, qu’elle soit pauvre ou immensément riche.

Dernièrement, New York se réveille sous la neige alors que tout le monde l’attendait dans quelques semaines. Nous savons que les dinosaures ont peuplé la terre pendant 60 millions d’années, et les éléments les ont rayés de la carte, eux, si forts et si puissants, adaptés à la survie dans une nature exigeante.

Nous ne pouvons pas tout maîtriser

Faut-il en déduire qu’il faut installer la panique à bord ? Cela ne servirait à rien. Il nous revient absolument d’avoir la sagesse d’aller vers plus d’humilité qui nous apporterait des éclairages dans beaucoup de domaines nous concernant : la répartition des biens, la solidarité, la réforme d’une économie imbue d’elle-même, l’écologie et bien d’autres domaines.

L’homme s’est octroyé le titre de maître du monde, d’un monde qui ne lui appartient pas, qui ne fait que l’héberger pour lui offrir toute la magie de son fonctionnement qu’il ne maîtrisera jamais, malgré tous les rêves de science fiction de dompter les éléments.

Tempête tropicale au mexique, le 27 octobre 2011 (RONALDO SCHEMIDT / AFP)

Ce qui est catastrophe pour nous ne l’est pas pour tout

Un peu de bon sens s’impose. Lorsque Xynthia dévaste la côte vendéenne, c’est sur une zone que l’on savait risquée. Quand les cours d’eau débordent, ce n’est pas la première fois.

Les japonais ont compris que les tremblements de terre les attendaient au tournant et ils ont été les premiers à adapter leurs habitations. Les incendies de forêt ne se développent que sur un terrain favorable, pas ou peu entretenu, il sont parfois salutaires. Certaines espèces de graine éclosent sous la puissance de la chaleur, le lynx du Canada chasse dans les brûlis, habitat favorable aux populations de lièvres d’Amérique, sa proie préférée.

Les débordements successifs au cours des millions d’années qui nous ont précédées ont enrichi les sols dont nous tirons notre agriculture. Les hautes montagnes, nées d’un cataclysme dantesque servent de réservoir d’eau bienfaitrice, donne des pâturages riches aux bovins et ovins.

Un processus sur le long terme

Sur l’instant, la nature qui reprend ses droits met l’homme dans une situation morbide et dévaste son habitat. A long terme, la croûte terrestre et la biosphère qui l’habille se secouent, s’étirent pour renouveler la diversité, pour la faire évoluer. Nous faisons partie de ce programme sur le long terme.

Par contre, ce que la grosse boule bleue n’avait pas imaginé, c’est qu’un trublion jouerait à son propre jeu, apprenti sorcier permanent, et dérèglerait la marche limpide de la vie d’une planète.

La beauté incommensurable du processus, sa complexité organisée selon des principes physiques et chimiques propres dont nous tirons nos recherches et nos trouvailles, cette profusion doit être la nôtre et non pas le contraire. Adaptons-nous au mieux, composons toujours avec les aléas que cela comporte : habiter dans une vallée protectrice peut se révéler être, un jour, un piège.

Faire vivre les sociétés avec ce que nous ne maîtrisons pas

Nos politiques devraient ne jamais oublier qu’ils sont élus pour représenter un peuple fragile, qui vogue au gré des caprices de son habitat, de la nature et pour cela, ne pas s’entêter à compliquer les choses en favorisant des systèmes artificiels de fonctionnement qui ne résistent pas à la catastrophe. Quête vaine de croissance au détriment de notre socle, au détriment à court terme des générations futures. Et alors, cela en vaut-il la peine ?

Philippe Szykulla
Philippe Szykulla
Publications: 184