Les grands sujets de société tournent autour de la peur : celle de l’autre, celle de perdre son travail ou d’en trouver un qu’on ne garderait pas, peur de l’avenir réservé à ses enfants… telles les déclinaisons latines, la litanie pourrait encore durer. On affuble Sarkozy d’un costume de croquemitaine qu’il ne mérite pas. Ce n’est pas lui qui effraie, ce sont les français qui s’infligent à eux-mêmes les affres de la crainte. À force de plier, de se résigner, de ne jamais se révolter, de se complaire dans sa servitude le peuple vit dans une sorte de torpeur inquiète, un peu celle que l’on connaît les jours de fièvre, entre le délire incontrôlé et la conscience irréelle.
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La peur est en nous, on ne nous l’impose pas
La politique de la peur ne veut rien dire, il serait préférable de parler de politique adaptée. Les vieilles gens disaient que devant un chien agressif il ne fallait pas montrer sa peur, que celle-ci redoublait la fureur de l’animal. Dans notre cas, celui qui suit cette abominable affaire de meurtre en série perpétrée par ce fou de Dieu, outre le fait que la France pleure le malheur des victimes, il n’y a qu’un prétexte à se donner des frissons. Il ne faut nier le danger, mais, un peu comme dans les veillées d’antan les contes de la nuit tombée ne laissaient pas l’auditoire rentrer rassuré dans le noir d’une ruelle, chacun surjoue et entretient son effroi, aidé en cela par la sur-médiatisation.
Quoi de plus normal que le politique se saisisse d’une préoccupation. S’agit-il ici de faire peur ou de se saisir d’une peur pour en faire un argument électoral ?
Sarkozy nous effrayer, sans crédibilité ?
Je ne crois pas qu’un seul homme, fut-il Sarkozy, puisse influer sur le subconscient de ses concitoyens comme le soulignent certains. Il n’est déjà plus crédible, a tellement gesticulé qu’il ne crie au loup que pour lui-même. Cela n’empêche pas l’habitant des villes de s’abstenir d’une promenade loin des feux des réverbères et le fils de trembler en allant chercher un brin de thym au fond du jardin, seul sous les pâles étoiles. L’instrumentalisation de la peur n’est pas nouvelle, ni même celle de la haine, de la dénonciation de la différence, ce qui change aujourd’hui c’est que les jeux du cirque sortent des murs, s’affichent sur tous les écrans plasmas, dans tous les salons, entre la série interdite aux moins de 12 ans et les infos sanglantes de 20 heures. La frousse existe toujours au fond du cerveau reptilien, mais elle est enfouie sous un néo-cortex encombré d’images et de scènes d’horreur.
Au-delà de la peur, une nouvelle société ?
L’empreinte collective a changé en ce qu’elle est conditionnée par ses habitudes de consommation visuelle. Il n’est plus besoin de croire que l’homme doit être contraint par la peur et l’absence de liberté… il est mûr à point pour basculer dans l’ultime phase de science fiction qui l’attend : une mondialisation technocrate qui décidera de son bonheur, lui-même issu de ses peurs consolées.
Être maître de son destin, une bonne thérapie
Croire en la révolution citoyenne, en ce qu’un président sortant demande à être aidé, qu’un autre promette la lune est bien plus dangereux qu’une angoisse salutaire, qui vous fait fuir au moindre danger. Il serait bon de s’affranchir de cette idée que des adultes peuvent penser pour d’autres adultes, au nom d’une légitimité électorale, et de discuter avec son voisin de ce qui lui sied réellement. La seule chaussure à son pied sera celle qu’il aura choisi par lui-même, en son âme et conscience.
Faut-il toujours choisir les produits en tête de gondole ?
C’est donc le moment de faire la nique aux habitudes qui veulent que deux favoris tuent le suspens en alimentant la peur d’un lendemain qu’il est l’unique candidat à pouvoir maîtriser, le moment de faire monter un troisième homme qui chamboulerait les poncifs qui prédisent la puissance au premier ou au deuxième… Mélanchon a cette séduction, Bayrou aussi, paraît-il (Le Pen pas du tout !)… alors tentation de miser sur un des suivants ?